Développons la sphère mentale de notre cheval en lui donnant des responsabilités
de la série Responsabiliser son cheval
Nous venons d’entamer une série où nous nous attarderons au développement mental de notre cheval. Je dis toujours que c’est un peu le ‘’parent pauvre’’, le ‘’négligé’’ de l’équitation car nous sommes évidemment centrés sur la monte (développement physique) et ce en sécurité (développement émotif) avec un cheval confiant.
Nous nous sommes attardés longuement à l’aspect émotif dans les articles de la série BÂTIR LA CONFIANCE et aux aspects émotif et mental en parlant de l’importance de la connexion avec son cheval dans les articles de la série sur le PARTENARIAT AVEC LE CHEVAL tout comme dans la série APPROFONDIR NOTRE COMMUNICATION.
Cécile Pardi dans son livre ‘’Les chevaux de cœur’’ nous rappelle : ” il est reconnu que les animaux ont un 6e sens tels les chats qui se couchent sur l’organe à soigner, les chiens qui prévoient les crises d’épilepsie ou diagnostiquent le cancer et les chevaux utilisés pour de nombreuses thérapies. Linda Kohanov d’Eponaquest et sa formation en Mieux-être facilité par les chevaux tout comme James French avec sa Trust technique ainsi que d’autres auteurs nous démontrent l’immense répertoire des chevaux au niveau des émotions, comment ils ‘’lisent’’ leur humain. Ralf Helmut Stammsen, docteur en éthologie et en zoologie, spécialiste du comportement et du langage non-verbal, Elodie Hammiche et son Cheval enseignant ainsi que d’autres nous ont éduqué face aux capacités insoupçonnées de nos chevaux.
Lors d’une séance de télépathie avec ma jument Indy elle nous a dit d’un ton bien clair ‘’Les chevaux ont un potentiel inexploité’’. Ouf! J’avais bien capté son message avant la séance et je l’avais inscrit à la fin de mon article sur le Pouvoir de l’intention de la série APPROFONDIR NOTRE COMMUNICATION. Certes que ça m’a porté à réfléchir d’autant plus que c’est un cheval à qui j’ai donné beaucoup de responsabilités lors de nos multitudes sorties car elle est confiante et aime bien assumer son rôle de partenaire responsable.
Dans cette série nous nous attarderons à des aspects du développement mental du cheval en le respectant dans son entité : on lui donnera plus de responsabilités, l’impliquera dans nos décisions et parfois on pourra le laisser faire des choix afin d’exploiter son potentiel dans toutes ses dimensions.
3 sphères du développement du cheval : elles sont étroitement interreliées
Physique : ce que fait le cheval
Mentale : ce que comprend et ce que pense le cheval
Émotive : comment se sent le cheval par rapport à ce qui se passe
Cet article se centre sur la sphère mentale du développement de notre cheval en lui donnant des responsabilités. Certes que nous prenons bien soin des besoins physiques de notre cheval : équipement, soins vétérinaires et autres professionnels, alimentation etc.
Au niveau émotif nous y portons aussi beaucoup attention car notre sécurité en dépend. Si notre cheval est calme, confiant, bien dans sa peau et dans l’environnement, notre sécurité est mieux assurée.
Rose-Alie St-Hilaire d’Équitation simplifiée au Québec nous rappelle que la stimulation mentale ” désigne la sollicitation méthodique des fonctions cognitives, psychologiques et sociales de notre cheval” . Dans la nature le cheval parcourt plusieurs kilomètres à la recherche d’eau et de nourriture. Pendant ce périple plusieurs stimuli seront rencontrés et le cheval aura des décisions à prendre. En captivité ils auront évidemment beaucoup moins à dire et à faire car l’humain gère beaucoup de leur quotidien.
Alors comme nous rappelle Rose-Alie, c’est notre travail de leur offrir des occasions de stimuler leurs neurones. Un cheval qui manque de stimulation mentale a parfois un trop plein d’énergie, s’invente de nouvelles peurs, ou tout simplement est moins intéressé. Certes que je peux apporter de la variété dans les entraînements, dans leur routine, mettre des jouets dans son box et au paddock. Dans l’article, Comment les patrons aident votre cheval? de la série BÂTIR LA CONFIANCE j’aborde brièvement le sujet de COMMENT ENGAGER LE CHEVAL MENTALEMENT de même que L’IMPORTANCE DE CHANGER CERTAINS PATRONS (routines) ceci afin de garder le ” mental ” occupé et intéressé sans toutefois stresser notre cheval car on sait qu’ils sont néophobes.
Jane Smiley romancière nous rappelle dans son livre HORSE HEAVEN que ” l’esprit des mammifères se développe par l’interaction sociale et la stimulation mentale’’.
Ce n’est pas dans nos habitudes et ça vient quelque peu bousculer nos façons habituelles de faire. Il est intéressant de penser que mon cheval se questionne sur le programme aujourd’hui, sur comment on va sortir du paddock par exemple : par devant, de reculons, en liberté (selon les conditions de sécurité et l’éducation de son cheval), avec licol attaché à droite, ou à gauche et même parfois tête nue? Ne serait-ce que de ne pas toujours mettre son cheval sur les chaînes. Je ne suis pas du tout contre, tout au contraire, tous les chevaux doivent être confortables à être attachés, ça fait partie de leur éducation de base. Mais quand les conditions le permettent pourquoi ne pas lui donner la responsabilité de se tenir calmement en place dans son rectangle imaginaire, en liberté. Et selon les circonstances de même que son niveau d’éducation on augmente graduellement le temps puis la distance. L’article sur le ‘’Rectangle : votre cheval choisit l’arrêt’’ de la série PARTENARIAT décrit bien cette technique.
Certes que si nous varions les routines d’entraînement, les pistes en randonnée stimulera l’intérêt de notre cheval.
Les horsemen s’accordent à dire que plus nous donnons des responsabilités à nos chevaux, plus ils en seront reconnaissants et se sentiront fiers, dignes et valorisés. Plus cela développera leur potentiel de penser et de prendre de bonnes décisions. Andrea Wady et Elsa Sinclair ont popularisé le concept de “Pure liberty”. L’article Pure liberté de la section APPROFONDIR NOTRE COMMUNICATION explique bien ce concept. Elsa, tout comme l’ensemble des horsemen/women nous encouragent à mieux écouter nos chevaux de même que de leur donner des choix afin de respecter leurs idées, leurs goûts de même que leur dignité! Parfois cette façon de penser et de faire nous sort de notre zone de confort et bouscule nos habitudes car nous laissons, en ces moments, notre cheval prendre certaines décisions.
Le prochain article de cette série ‘’Votre cheval solutionne des problèmes simples’’ donnera plusieurs exemples de ce concept.
Photo : Donnez un but à votre cheval, il vous en sera reconnaissant!
Les ‘’horsemen’’nous disent ” on responsabilise” et non ” on organise’’ notre cheval.
Lyne décrit bien cette façon de faire et de penser dans le texte ci-bas.
Photo ⏬ : Le très réputé Tom Dorrance nous rappelle que ce que nous désirons c’est d’aider notre cheval à utiliser ses neurones. On lui présente quelque chose et on le laisse figurer comme résoudre le dilemme.
Des responsabilités à donner à notre cheval
Une des premières responsabilités que nous donnons à notre cheval lors de l’entraînement c’est de ne pas nous envahir tout comme nous respectons leur bulle personnelle. Un cheval poli est fort agréable à manipuler.
Les articles ‘’Réclamer son territoire et Réclamer votre territoire, les exercices de la série PARTENARIAT décrivent comment y arriver.
Une deuxième responsabilité est de suivre le ‘’SENTI’’ sur la courte longe puis de se synchroniser au mouvement des pieds de son leader.
Puis, on demande à notre cheval de maintenir l’allure, la direction ainsi que la vitesse demandées autant lors du travail à pied qu’en selle, sans avoir constamment à lui rappeler.
Une fois ces bases bien acquises, pensons à diminuer la micro-gestion le plus possible afin de stimuler notre cheval mentalement et émotionnellement.
Certes que les cowboys qui ont des chevaux de travail peuvent en attester: leurs chevaux ont un but dans les exercices demandés et ils sont capables à un certain niveau de prendre des décisions justes. Un excellent exemple sont les bons chevaux de ‘’cutting’’ où les cavaliers nous disent qu’ils laissent leur cheval exécuter les mouvements et que leur rôle consiste principalement à les suivre et surtout ne pas leur nuire. Tout comme les chevaux qui attendent leurs cavaliers une fois qu’ils ont attrapé le veau et qu’ils descendent du cheval pour aller attacher les pieds; leur cheval attend patiemment en totale liberté. Les chevaux qui déplacent le troupeau de bétail utilisent aussi des stratégies pour leur sauver des pas: les chevaux plus expérimentés vont plus lentement afin de ne pas effrayer le troupeau ce qui les ferait se déplacer plus loin et plus vite pour aller récupérer les vaches qui se seraient éloignées.
Et que dire des chevaux des bûcherons qui ramènent parfois seuls le bois qu’ils tirent jusqu’au camp puis retournent dans la forêt vers les bûcherons. Puis les chevaux sur la ferme qui faisaient divers travaux. Tout comme le cheval du laitier du village qui connaissait son parcours par cœur même celui du samedi qui était parfois différent.
Photo du cheval du laitier dans mon village natal. Elle date d’avant 1964 année de mon départ pour mes études. Ce cheval connaissait son itinéraire par cœur même celui du samedi qui semble-t-il était différent. J’ai revu son propriétaire il y a une vingtaine d’années et il m’a rappelé comment son cheval était intelligent. Évidemment il n’était pas surpris que j’aie eu des chevaux une fois adulte.
Quand on pense à cette époque avant l’invention de l’automobile et des moteurs, les chevaux travaillaient soit à la ferme, dans le village ou les camps de bûcheron, on était à une époque où les chevaux avaient des responsabilités. Mon amie Kathy, élevée dans un village en Colombie Britannique, allait à l’école en calèche ou en carriole selon la saison. Les chevaux attachés attendaient les élèves toute la journée. Travail inintéressant j’en conviens car leur journée était plus longue que lorsqu’ils amenaient la famille à l’église pour la messe. Évidemment, non seulement elle ne le guidait pas dans son parcours, il choisissait où se placer pour être attaché. Les plus intelligents dit-elle se mettaient à l’abri du soleil quand il faisait chaud et au soleil l’hiver.
Puis parce qu’ils sont devenus chevaux de loisir on s’aperçoit que nous passons beaucoup de temps à les développer au niveau physique quelle que soit la discipline pratiquée. Quant au niveau émotif, plusieurs fois c’est le contrôle par micro-gestion où le cheval finit par se détendre suite à de nombreuses demandes de travail de la part de son cavalier. Ceci ne développe habituellement pas la confiance car de fois en fois le cheval commence quelque peu tendu pour se détendre à la longue. Et surtout on voit l’habitude d’ÉVITER LES STIMULI AU LIEU D’EXPOSER LEUR CHEVAL.
Notre sécurité étant primordiale nous devons développer la relaxation et la confiance chez notre cheval dès le départ. Une copine me disait récemment ‘’mon cheval est enfin à l’aise dans les coins au fond du manège après 9 ans, grâce aux exercices au sol que nous avons fait ensemble’’. Lorsqu’elle m’en avait parlé antérieurement, je lui avais répondu poliment ‘’tu sais, si les stratégies que tu as utilisé jusqu’à maintenant n’ont pas donné les résultats escomptés, il faut changer de stratégies. C’est ce que tu as fait depuis que tu m’en as parlé il y a un an et tu vois le résultat’’. Malheureusement, le travail à pied n’est pas suffisamment étoffé et consiste souvent qu’au travail avec la longe et des interminables cercles, souvent de même grandeur et peu de transitions et peu de changements de direction. On gère encore le cheval et ne lui demande même pas de maintenir la vitesse ni l’allure car on est en constante demande juste à entendre les ‘’clic, clic, clic’’ vocaux constants.
Quelques exemples démontrant le manque de préparation du cheval
Deux anecdotes récentes à mon écurie.
Suite au décès de son 3e coloc sur 3 en 2 1/2 ans ma jument Indy avait le moral bas. Une journée, je l’ai amenée dans le manège afin qu’elle se couche pendant que 2 amies bien à l’aise qu’elle soit là en liberté, on monté. Indy a ronflé, elle était couchée au fond du manège. Comme j’allais la chercher avant que la cavalière suivante entre pour sa leçon, la copine est entrée sans regarder; quand elle a aperçu Indy couchée elle a paniqué, son cheval de 15 ans de même. D’autant plus curieux que ce cheval est souvent mis en liberté avec Indy dans le manège et il l’adore. Je n’ai pas trop vu le scénario ayant le dos tourné vers le fond du manège. Quand je suis revenue vers la porte, une autre copine lui a dit qu’elle avait manqué une très belle occasion d’exposer son cheval à Indy couchée. Je lui ai offert, si elle le désirait, qu’on pourrait faire cet apprentissage ensemble pour développer la confiance de son cheval. Je pourrais demander à Indy de se coucher et avec les techniques d’approche/retrait/rapproche on y arriverait. Cette copine me dit toujours que Indy est gentille; non lui dis-je pas qu’elle n’est pas seulement gentille c’est que je lui ai montré plein de choses, l’ai développé différemment avec des stratégies qui ont donné un résultat tangible.
Quelques jours plus tard, l’instructeur était sur le dos de ce même cheval. Il y avait de nouvelles planches de bois déposées au sol dans le coin du manège et le monsieur s’est fait brasser +++++ car le cheval a eu peur des nouvelles planches. Triste, triste! Le lendemain la copine m’a vu amener les 2 fjords sauvages dans le manège. Ça faisait 2 mois qu’ils y étaient allés. Je les ai laissé explorer puis je suis allée dans le coin bouger ces planches ++++ et ils ont à peine réagi. Les deux m’ont regardé, j’ai arrêté de les bouger, c’était le calme. La copine était dans la sellerie et quand elle est venue voir ce que je faisais dans le manège, elle n’en revenait pas. Si en 12 ans tu as montré un manège que je dis aseptique à ton cheval eh bien certes qu’il ne sera pas brave…… pas de sa faute. Je lui ai rappelé qu’un de mes objectifs était de leur montrer à PENSER AVANT DE BOUGER LES PIEDS!
Ce sont deux exemples au niveau de la sphère émotive de notre cheval. Voyant ceci on peut bien s’imaginer que la sphère mentale est encore plus négligée.
La sphère souvent mise de côté, je dis souvent le parent pauvre de notre travail avec notre cheval. Le cheval comprend-il bien la tâche à accomplir? A-t-il parfois la chance de décider de quelque chose? Nous savons qu’une des 4 raisons pourquoi un cheval refuse sont :
– la peur,
– l’incapacité de faire l’exercice car les prérequis manquent
. – son non-vouloir; parfois il dit non parce qu’il ne veut pas collaborer
– le cheval ne comprend pas ce qui lui est demandé, qu’il ne sait pas ce à quoi on s’attend de lui. Un aspect fort important à considérer lorsque nous travaillons avec nos chevaux.
Je dois humblement avouer que je dois me creuser les méninges pour donner, dans le quotidien, des responsabilités à Indy qui ne demande pas mieux que de prendre des décisions dans diverses situations. Ce n’est pas dans nos habitudes de donner des responsabilités sauf chez les gens qui ont des chevaux de travail. Plus on y travaille, plus on s’y amuse et notre cheval est content.
QUELQUES EXEMPLES OÙ LE CHEVAL A DÛ PENSER ET PRENDRE DES DÉCISIONS
Le célèbre Ray Hunt nous a encouragé à donner des responsabilités à nos chevaux.
Panneaux de rond de longe à déménager
Une de mes premières expériences avec ce concept de donner des responsabilités à mon cheval c’est lors d’une semaine au ranch de Ron Pyne, instructeur Parelli 3*, en Ontario avec une amie et nos deux chevaux. J’étais avec Poney le fjord norvégien de ma propriétaire d’écurie, cheval qui m’a ouvert la porte toute grande pour apprendre à faire les choses différemment. Le jour, pendant le repos, nos 2 chevaux étaient dans un rond de longe, en plein soleil et il faisait très chaud. Un fjord ce n’est pas friand de la chaleur avec leur corpulence massive. Ron me dit :
‘’ Poney tire-t-il des objets ?
‘’ Oh! que oui, n’importe quoi! Non seulement il tire, mais il ADORE ça’’ lui ai-je répondu
Alors nous nous sommes dirigés vers les panneaux de rond de longe couchés au sol, mon amie les attachait et nous donnait la longe. Nous avions un parcours assez long à faire et surtout des angles de 90 degrés pour contourner le tas de fumier, un abri puis un autre 90 degrés pour négocier la porte de la clôture. Une fois passée il fallait encore faire un angle de 90 degrés car il y avait des autos et une remorque. Ron ne les avait pas déplacées car il voulait nous faire travailler. Et après ces 4 angles de 90 degrés, un 5e et dernier.
Photo : Poney s’est retourné de lui-même pour voir si le panneau avait bien traversé la porte avant de faire un angle de 90 degrés vers la droite pour éviter l’automobile. Ce n’était que le 2e panneau, Poney avait déjà compris ce qu’il devait faire.
Non seulement Poney a fait ça avec brio mais quand on est retourné vers les autres panneaux il a pivoté de lui-même et quand le panneau suivant fut attaché, il connaissait déjà le parcours. En effet les chevaux ont un potentiel peu exploité.
Indy doit moduler sa vitesse pour ne pas effrayer les vaches
J’ai vécu une expérience avec Indy la première fois que je suis allée à un stage avec des vaches avec l’excellent horseman québécois Éric St Arnault. Je n’ai aucune expérience dans ce domaine mais Indy a été élevée en C-B pendant 4 ans dans une immense vallée de 12 km avec un troupeau, plus de 50 têtes de chevaux et de bétail. La photo de gauche démontre Indy qui sait garder sa distance afin d’envoyer les vaches à l’autre bout du manège sans les perdre car si elles sont trop poussées, elles vont déguerpir et tenter de retourner vers les autres vaches. Indy avait compris l’exercice. Quant à moi, je dois avouer avoir été passagère; c’est Indy qui avait la responsabilité d’accomplir les tâches et de contrôler sa vitesse car je n’ai aucune expérience avec les vaches. Ce qui fut le plus surprenant c’est que nous avons réussi l’exercice, certes que ce n’était pas grâce à moi.
Lors de mon travail j’ai dit à Eric ‘’ Indy ne regarde pas les vaches, elle ne regarde pas ce qu’elle fait’’ et lui de me répondre ‘’ il ne faut pas qu’elle les regarde sinon elle les chasserait, elles sont très sensibles et leur bulle est grande, ta jument le sait’’
Évidemment pour nous, dans le quotidien, il est plutôt rare que nos chevaux aient à travailler de la sorte mais plus nous tentons de leur donner des responsabilités, plus ils exerceront leur capacité à penser. Nous sommes souvent portés à les encadrer beaucoup plus que nécessaire. Pourquoi ne pas leur laisser plus de responsabilités, ils en seront fiers.
La technique du rectangle imaginaire
Une fois la technique du rectangle bien maîtrisée de même que les concepts du ” sweet spot ’’ et confort/effort, pourquoi ne pas demander à notre cheval de rester sur place en liberté pendant le pansage? La technique du ‘’rectangle imaginaire’’ :voir l’article Le rectangle, votre cheval choisit l’arrêt, article de la série sur le PARTENARIAT.
.Photos : Lili en liberté dans l’allée de l’écurie pendant que Uta la brosse.
Photo dans le box porte ouverte pendant que nous vaquons à nos occupations ou allons chercher l’équipement!
Photo : Indy en liberté dans l’allée avec la pareuse de son sabot arrière gauche alors que je vais au pré chercher le prochain cheval. Puis Aramis au box, porte ouverte, pendant que je vais chercher son grain ou la selle. Le box est à l’entrée de l’écurie où les gens passent pour aller au manège. Même si d’autres chevaux passent, lui tout comme Indy demeurent TOUJOURS dans le box. Évidemment je les remercie toujours même si ça fait des années qu’ils prennent fièrement ces responsabilités.
Évidemment c’est une façon de procéder pour des chevaux éduqués, fiables et sécuritaires.
Cet hiver je peux dire que ce ne fut pas un hiver normal, trop chaud, peu de neige et de la glace. Nous avons donc été plus souvent dans le manège. On met des barres au sol, des cônes et on joue des jeux tels des ‘’pas de deux, même de trois’’ etc.
Dernièrement quand l’instructeur de saut est entrée avec 2 élèves, nous étions à ramasser les cônes, barres et baril alors que Indy était en liberté au centre en position ‘’RESTE’’. Voilà que j’entends l’instructeur dire à ses élèves qu’avec Indy c’était OK de commencer le réchauffement de leurs chevaux car elle était au travail et fiable même si elle était en liberté. J’en fus surprise car ce n’est pas ce qui se passe habituellement. Nous allons porter nos chevaux dans l’écurie et revenons replacer tous les petits obstacles : c’est bien OK de faire ainsi afin d’assurer la sécurité des cavalières.. Encore une fois c’est parce qu’Indy est gentille… si seulement ils savaient comment mieux éduquer leurs chevaux. C’est un monde de pansage rapide, entrer dans le manège, et hop! à cheval tout de suite et on débute le travail.
Indy sert de gardienne dans le manège
Dernièrement, une copine d’écurie me demandait si elle pouvait mettre Indy en liberté dans le manège pendant ses leçons s’il n’y a pas d’autres chevaux car son cheval est nerveux et tendu dans le manège quand il est seul. J’ai évidemment dit ” oui Indy est très capable de faire ça’’. La proprio de l’écurie, son instructeur, l’a placée et lui a demandé de RESTER et Indy y est restée sans bouger pendant 45 minutes. Indy vit au pâturage avec les chevaux de la proprio donc elle la connaît très bien.
J’ai suggéré à l’instructeur de laisser Indy se placer car je n’osais pas lui dire qu’elle ne l’avait pas placée au bon endroit. Quelques jours plus tard on m’a envoyé cette photo, Indy toujours dans le manège; cette fois elle a décidé d’elle-même de se mettre à un autre endroit et a fini par s’y coucher. Elle a même dormi. Elle semble fière de faire la gardienne. La proprio me disait ‘’c’est curieux, quand je la laisse se placer d’elle-même, elle va toujours vers la droite’’. Je savais pourquoi Indy allait dans ce coin. Si vous regardez le manège, la porte d’entrée/sortie est au bas de la photo et le fond du manège en haut de la photo. Le fond représente quelque peu le ‘’monstre’’, le danger alors que la section où se trouve la porte d’entrée/sortie est un sweet spot.
Comme le cheval monté fait des cercles que dans la première moitié du manège eh! bien il est clair que lorsqu’il est en main gauche, le monstre est vu de l’œil droit. Indy a bien perçu le degré de stress du cheval et s’est placée d’elle-même à droite afin de donner confiance à Rafik. Rafik connaît Indy et certes qu’elle était en confiance et en se couchant c’était un élément de confiance additionnel pour Rafik.
Indy avait un ‘’job’’ à faire et elle l’a très bien fait. La copine qui m’a envoyé la photo était la prochaine étudiante, venue dégourdir les pieds de son cheval avant sa leçon. Elle était très inquiète de monter son cheval avec Indy couchée. Elle connaît très bien Indy qui a accompagné son cheval en randonnée pendant des années mais là Indy était non seulement couchée mais en liberté. L’entraîneur lui a dit ‘’ penses-tu que Indy va attaquer ton cheval, elle est couchée? Et en plus ce n’est pas son genre dit-elle. Un cheval socialisé ne blesse jamais un congénère car ils ont besoin de tous les yeux et toutes les oreilles’’. Ce fut la responsabilité que l’on a donné à Indy et elle l’a très bien fait. Souvent quand j’arrivais si Indy était à son travail dans le manège même si elle me voyait ou entendait ma voix elle était comme une statue de plâtre et ne bougeait pas. Je crois sincèrement qu’elle était fière de sa responsabilité.
Même que récemment je disais à Indy alors qu’on revenait du pâturage qu’aujourd’hui on amenait Rafik en randonnée et qu’elle serait la gardienne. Ce cheval est plus confiant dehors.Lorsque nous sommes entrées dans l’écurie (Indy est toujours en liberté en synchronisme avec moi,) elle n’est pas allée à son box le premier à gauche mais s’est dirigée à droite vers le manège où Rafik était monté. Pourtant nous allons rarement dans le manège mais je crois qu’elle avait compris qu’elle serait la gardienne de Rafik. C’était le bon cheval, la bonne tâche mais pas le bon endroit car cette fois c’était en randonnée. Elle avait par contre compris l’intention. Pour elle, gardienne voulait dire dans le manège car régulièrement elle était la gardienne de Rafik dans le manège. Certes qu’elle était fière de ce travail car tout le monde la félicitait.
Quelques semaines plus tard, j’ai dit à Indy qu’on amenait Jack le cheval d’Elisabeth la propriétaire de l’écurie en randonnée. Indy est le seul cheval qui vit dans le pâturage avec les chevaux de la propriétaire. Elisabeth se préparait dans le manège, concept confort/effort et puis on irait marcher dehors. Indy s’est à nouveau dirigée vers le manège; elle avait compris l’intention (gardienne de Jack) mais encore une fois, pas enregistré le mot randonnée.
Eddie et le trempage de son sabot
Eddie avait besoin de faire tremper son sabot et il déteste l’eau, ne veut pas y mettre le pied. Mon amie le mettait sur les chaînes et travaillait fort à ce qu’il dépose son pied dans le bol d’eau avec iode. Il déposait le pied, le sortait, le déposait à nouveau et ainsi de suite. Finalement il y avait de l’eau partout autour du seau par terre. Quand on a fait un stage de Mountain Trail les obstacles les plus difficiles pour lui impliquait de l’eau.
Alors j’ai proposé à mon amie de faire différemment. Premièrement je l’ai détaché des chaînes et lui ai poliment demandé de rester dans son rectangle imaginaire. Puis je lui ai demandé de baisser la tête afin de stimuler la sécrétion d’endorphine. Souvent sur les chaînes la tête un peu haute et ils sont plus sur l’adrénaline que l’endorphine. J’ai pris mon temps, Lyne nous rappelle souvent 20% de pression et 80% de relâchement.
Ensuite il fallait mettre le fameux sabot dans l’eau. Il donnait bien son pied mais ne voulait pas le mettre dans le bac de liquide. Je pointais le sabot et l’eau et finalement de lui-même il y a mis son sabot et ne l’a JAMAIS SORTI tant qu’on ne lui a pas demandé.
Je crois que le simple fait d’avoir la tête plus basse, donc que le cheval soit plus détendu a contribué à ce succès. Et cette fois pas une goutte d’eau par terre alors que vous voyez les 4 autres essais où l’eau était renversée du seau d’eau. Si vous remarquez sur la photo, Suzanne n’y est pas. Nous sommes toutes les deux un peu plus loin et avons détourné notre ‘’chi’’ de lui afin qu’il gère lui-même et qu’on ne le micro-gère pas. Eddie était dans son rectangle imaginaire, bien calme, pas inquiet du tout et fier.
Indy dans les parades
Indy est expérimentée en parades en ayant fait 47 à 8 endroits différents : Noel, la St Jean, la St Patrick et autres festivités dans les villages avoisinants. Elle a toujours été bien calme malgré le brouhaha, les bruits de tracteurs, camions de pompiers fanfares etc.
Elle module elle-même sa vitesse de croisière lors des parades. Elle aime voir les visiteurs car elle est très consciente qu’elle est admirée par tous les ‘’ ah, ah’’. Je lui donne souvent la permission et elle gère la durée de la visite car quand elle s’aperçoit qu’elle est “en retard dans la parade” elle reprend le parcours d’elle-même. JAMAIS elle n’a trotté pour reprendre le retard mais elle marche plus vite pour se rendre à sa place. De plus, je la vois regarder en arrière et si le char allégorique qui nous suit approche elle cesse ses visites d’elle-même pour poursuivre sa route. Et elle n’est pas gérée par les rênes, elles sont TOUJOURS détendues
Elle a toujours participé en licol ou side pull afin d’être sécuritaire mais je n’utilise que la cordelette. Sauf au Horse Lovers weekend à Upper Canada Village, où invitée par Farah Green l’invitée d’honneur, à y aller tête nue, qu’avec une cordelette. Souvent j’ai les mains sur les cuisses; elle gère elle-même le rythme et le fait TRÈS BIEN
Photos du bas à gauche : Indy ferme la parade et module son rythme selon ce qui se passe devant elle. Elle est restée calme même si la cavalière devant nous avait un cheval très émotif, tenu serré car il piétinait beaucoup. A droite : Indy accompagne la calèche de la mairesse. Quand j’ai vu la photo, j’ai réalisé qu’encore une fois je n’ai pas les mains sur les rênes mais sur les cuisses. Elle est en confiance.
Donnons des responsabilités à notre cheval en randonnée
En randonnée si on doit :
- récupérer un objet échappé parfois par une copine moins habile à monter et descendre de son cheval ailleurs que sur le montoir.
- aider une copine en difficulté
- aider les gens lors d’un incident
- quand on a un ou des chevaux de bât, le cheval monté est capable de gérer la vitesse des chevaux de bât par son langage corporel, surtout avec ses oreilles et si nécessaire des grimaces. Ainsi les chevaux de bât ne dépasseront pas les pieds de la cavalière.
Pourquoi ne pas laisser notre cheval là, lui demander de rester en place et vaquer à notre occupation? Évidemment avec un cheval confiant et calme qui se sent en sécurité. Tout comme donner la responsabilité à son cheval de voir si le ou les chevaux avec qui nous sommes en randonnée suivent. Indy a un assez grand pas et quand elle est en avant je n’ai jamais besoin de lui dire que le cheval avec qui nous sommes est un peu loin en arrière tout comme quand un cheval en arrière arrête pour uriner ou déféquer, Indy arrête d’elle-même et même se retourne un peu pour s’assurer que tout est OK en arrière de nous.
Puisque c’est une jument à la fois confiante et exposée à divers stimuli au cours de nos 200+ sorties, elle est celle qui accompagne les chevaux moins expérimentés ou un peu nerveux quand nous allons en randonnée. Elle change d’elle-même sa position afin de se mettre entre ce que les chevaux perçoivent comme inquiétant (VTT, motoneige, calèches ou carrioles, chiens au club canin, skieurs de fond, marcheurs avec enfants ou des chiens) afin de se mettre comme sentinelle. Dernièrement avec une copine dont le cheval était inquiet de passer vis-à-vis un site de construction, Indy a pris les devants pour passer sur la piste; puis une fois rendue parallèle au brouhaha, elle a ralenti d’elle-même et laissé Pax à sa gauche puisque le bruit était à notre droite. Mais ce qui m’a le plus surpris c’est que nous devions faire un 90 degrés pour prendre la piste de retour à l’écurie. Dès que nous avons fait face à cette piste pour le retour, le brouhaha était derrière nous. Indy s’est arrêté, a laissé passer Pax et a couvert son postérieur. J’en fut quelque peu estomaquée car je ne comprenais pas pourquoi elle arrêtait mais elle savait que si elle était en arrière son ami serait plus confiant.
Une autre fois avec Moesby moins expérimenté en randonnée, il y avait plusieurs chiens en liberté sur leur terrain à notre gauche. La cavalière est devenue inquiète, je lui ai rappelé de prendre de profondes respirations , de relâcher un peu les rênes. Tout de suite, Indy s’est mise d’elle-même à la gauche de Moesby agissant ainsi comme sentinelle protectrice. Je n’ai jamais besoin d’intervenir dans ces cas, Indy sait très bien quel est son rôle.
Photo : Indy au retour d’une marche dans le bois avec Moesby. Elle se lèche ++ les lèvres au retour et démontre bien qu’elle est contente d’avoir cette responsabilité. Moesby était littéralement sur sa queue car la cavalière était débutante mais en confiance. Photo précieuse pour nous car c’est la dernière photo de Moesby qui est décédé deux jours plus tard.
Et que dire où mettre les pieds quand les pistes sont raboteuses, quand il y a de la boue et dans les pistes de neige. Indy a été élevée à l’état sauvage dans une vallée de 12 km en Colombie Britannique où prédateurs étaient omniprésents. Je n’ai jamais à lui dire où mettre les pieds. Elle REGARDE. Tous les horsemen/women rencontrés dans mon parcours m’ont dit qu’elle avait un sens de proprioception développé. Certes pas à cause de moi mais dû à ses 5 années en liberté dans une immense vallée de 12 km et à l’immense ranch. Quand les chevaux se sauvent à cause des prédateurs jour et nuit, ils doivent savoir où sont chacun de leurs 4 pieds sinon le risque de blessure est grand et un cheval blessé c’est de la nourriture pour le prédateur.
Un cheval d’expérience s’occupe des autres chevaux en ce sens que s’il y a un lambin en arrière Indy s’arrête d’elle-même, regarde en arrière et repart quand le cheval nous a rejoint.
Lors d’une randonnée d’hiver avec deux amies, une a fait une chute car son cheval a eu peur de skieurs de fond et est parti à l’épouvante. Elle est tombée dans un banc de neige. Heureusement! Une peu secouée mais pas blessée. Nous avons récupéré son cheval et l’avons ramené à l’écurie en cheval de bât. Puis quand j’ai dit à Indy il nous faut retourner chercher France, elle n’a pas regimbé. Nous sommes retournées dans sa direction et quand nous avons aperçu France au loin Indy s’est arrêtée d’elle-même pour l’attendre, la neige était très profonde alors pourquoi faire un effort pour la rejoindre, on a juste à l’attendre, s’est-elle dit. Et sur le retour Indy s’arrêtait d’elle-même pour attendre France qui marchait évidemment plus lentement dans la neige épaisse. Certes qu’elle a eu une friandise pour ça. Je dis toujours que les chevaux comprennent notre intention et je suis certaine que Indy avait compris que nous retournions chercher la copine. L’article Le pouvoir de l’intention de la série APPROFONDIR NOTRE COMMUNICATION donne plusieurs exemples de l’intention.
Et que dire d’Indy qui sait que lorsqu’on accompagne Greg en calèche, elle ne doit JAMAIS passer devant la calèche. Parfois quand il y a des stimuli un peu inquiétants, on donne une friandise à ses chevaux. Alors quand je dis qu’on va donner un bonbon à Jack et Zdeno, Indy sait qu’elle devra passer derrière la calèche pour donner la friandise à l’autre cheval. Je n’ai pas besoin de lui rappeler.
Cheval de bât
Une excellente façon de donner un travail à notre cheval c’est d’amener un cheval ou des chevaux en cheval de bât. L’article 17 sur le Cheval de bât de la série PARTENARIAT explique comment s’y préparer autant humains que chevaux et détaille l’équipement et la technique.
Parfois le cheval assume une responsabilité sans qu’on lui demande
Plusieurs exemples cités ci-haut où Indy a pris des décisions pour protéger un autre cheval ou l’attendre mais cette fois elle m’a vraiment surprise.
Récemment alors que je m’apprêtais à sortir du manège, une copine est entrée pour monter. Le montoir est assez proche de la porte de sortie. Il est bien connu que son cheval ne reste pas au montoir; elle doit toujours le retenir. Je l’ai saluée et fut totalement surprise quand Indy a pris l’initiative de reculer et aller se mettre perpendiculaire devant ce cheval lui bloquant ainsi la possibilité d’avancer. Je n’y avais même pas pensé mais j’ai compris tout de suite son geste et en fut surprise.
Et que dire la fois que j’ai amené la petite Heidi de 4 ans dans le box avec moi pour brosser Indy car sa mère exaspérée, fatiguée criait après elle tout le temps. Quelle ne fut pas ma surprise quand Indy s’est étirée le cou pour fermer la demi-porte.
Conclusion
Tous des exercices préparatoires afin d’obtenir ce que Indy a pu accomplir avec confiance ci-bas à l’âge de 8 ans devant un public imposant. Cette excellente photo d’indy au Horse Lovers weekend au Upper Canada Village après sa première démo sans bride à l’âge de 8 ans. Farah Green, l’invitée d’honneur à cet événement, a dit à la foule ‘’Denyse va enlever la bride à Indy’’.Je ne m’attendais pas à ça du tout; nous avons fait du pas, un peu de trot et négocié les quelques obstacles sur le terrain puis j’ai guidé Indy vers le piédestal. J’ai pu la laisser sur place et aller porter la selle 20 mètres plus loin dans la tente. Indy n’a pas bronché d’un poil. J’ai eu du mal à ne pas me retourner pour voir si elle était OK mais je me devais de lui démonter que j’avais confiance en elle. Je peux vous dire qu’elle était TRÈS fière! Elle attendait les applaudissements de la foule quelque peu timide ne voulant pas lui faire peur. Quand la foule s’est déliée, Indy a très bien compris que c’était pour elle.
Photo : Patricia Barker
Ce texte est précurseur au 3e article de cette série de cette série RESPONSABILISER SON CHEVAL, Mon cheval solutionne des problèmes simples lequel adresse aussi le développement de la sphère mentale chez notre cheval.
Un gros merci à Denyse qui nous partage à chaque mois des articles de grande qualité.
Passionnément cheval 🐎❤️
Lyne Laforme 🤠 xxx