Approche, retrait, approche (1)

Ce concept s’applique à un ensemble de situations où nous demandons quelque chose de plus difficile à notre cheval au niveau émotif suivi d’un retrait vers quelque chose de plus facile avant de réitérer à nouveau avec l’exercice plus exigeant.

Cette technique s’applique surtout dans les cas de peur ou de non confiance alors que pour des exercices physiques difficiles on n’approche pas à nouveau après le retrait. Cette technique s’applique dans des situations telles :

  • Monter à cheval seul dans le manège ou en randonnée puis monter avec d’autres chevaux avant de monter seul à nouveau
  • Se séparer du troupeau ou d’un ami pour une longue période puis ne pas se séparer du tout ou raccourcir le temps ou la distance de séparation puis se séparer à nouveau pour plus longtemps ou plus loin
  • Introduire un cheval dans un troupeau: on l’y met un peu, un peu plus longtemps, un peu moins longtemps selon ses réactions de même que les réactions du troupeau face à ce nouveau cheval.

Toutefois, suite à un exercice difficile très bien réussi on effectue qu’un retrait sans faire une approche par la suite. Ainsi on ira marcher ou partir en randonnée, parfois même arrêter la session d’entraînement. On ne recommence pas l’exercice tout de suite; il ne sera pas mieux réussi et vous désirez que votre cheval comprenne qu’il l’a très bien effectué, qu’il a bien répondu à votre demande.

Chris Cox appelle ça le ‘’trempage’’: on laisse au cheval le temps d’absorber cette information afin que l’exercice soit bien compris ce qui augmente les chances de réussite la prochaine fois. Il y a toujours des exceptions à la règle générale : dans ce cas il n’est pas question d’inquiétude ou de peur chez le cheval car ce sont les sphères physiques et mentales du cheval qui sont sollicitées.

De plus en plus les entraîneurs parlent de retrait/approche ou APPROCHE/RETRAIT/APPROCHE plutôt qu’approche/retrait afin de rappeler aux cavaliers qu’il est très important d’approcher de nouveau après un retrait même si c’est juste un peu, sinon on enseigne au cheval de se retirer quand il est inquiet.

Principes sous jacents de la stratégie approche/retrait/approche

Les chevaux devraient toujours se sentir en sécurité quand on leur demande une tâche quelconque (concepts ‘’sweet spot’’ et confort/effort) d’où l’importance d’avoir travaillé la relaxation dans de multiples situations et face à des stimuli variés. Nous, humains, sommes “direct line” en ce sens que nous allons de A à B sans faire de détour. Habituellement, nous reculons ou retournons à notre endroit de départ que lorsqu’on a oublié quelque chose, pas à cause de la peur.

Nous avons tendance à agir de la même façon avec notre cheval. On entre dans le manège, on se dirige vers le fond pour faire le tour et recommençons le même patron. Puis on change de direction et recommençons le patron en sens inverse. C’est la façon traditionnelle d’échauffement avant de commencer le travail. Une cavalière me disait il y a quelque temps ‘’ça fait plus de 2 ans que je monte dans ce manège et mon cheval a encore peur d’aller au fond : il renâcle et fait des écarts parfois impressionnants”.

Quand je lui ai répondu, ‘’ tu devrais peut-être changer tes stratégies’’ elle a rebroussé chemin sans poser de questions; son cheval a toujours peur du fond du manège. Si nous utilisons toujours les mêmes stratégies, nous obtiendrons toujours les mêmes résultats.

Lorsque les chevaux ne sont pas confiants face à des obstacles, situations ou endroits inquiétants des techniques d’approche/retrait sont fort utiles afin de bâtir leur confiance. Ça ne consiste pas en une approche linéaire où après chaque essai on a du succès.

Au contraire, il y a beaucoup de va et vient, un peu comme un ‘’ yo-yo’’. On gagne un peu de terrain, on en perd un peu, même parfois beaucoup : c’est la valse entre ‘’on en gagne ou on en perd’ ’mais en bout de ligne on aura plus de gains et on atteindra le résultat convoité.

Quant face à un danger (ligne rouge) le cheval s’arrête, pour lui, avancer de 1 mm signifie DANGER+++. L’humain doit utiliser des bonnes stratégies; nous devons ‘’allumer nos lumières’’ sinon ça se termine en bataille de force et l’humain sera toujours perdant; le cheval aussi car il ne sera pas plus confiant.

Tout dépendant du niveau de stress du cheval de même que l’espace disponible, le leader a deux choix :

  1. Demander au cheval de rester là où il s’est arrêté, attendre, le laisser y penser, se calmer. Attendre les signes de relaxation et d’exploration avant de l’inviter à avancer un peu. N’oublions pas de cesser la demande dès qu’il y a un effort, ne serait-ce que de regarder l’objet, baisser la tête, le sentir, parfois le mordiller tout en n’oubliant pas que les pieds seront toujours les derniers à bouger. Cette technique demande plus de ‘’savoir faire’’ du leader afin qu’il adopte le langage corporel approprié. De plus, son “timing” de la demande à avancer doit être effectué au bon moment.
  2. Demander au cheval de se diriger vers le ‘’sweet spot’’ avant que l’objet ou la situation devienne intolérable. C’est au cheval et non à l’humain de décider de la distance où le cheval a atteint sa limite. N’oublions pas toutefois, le concept confort/effort donc le faire bouger dans sa zone de confort. JAMAIS AVEC L’INTENTION DE LE PUNIR DONC ATTENTION À NOTRE LANGAGE CORPOREL DE MÊME QUE VERBAL.

Quand le cheval sera détendu on le réinvitera à avancer vers la zone perçue comme dangereuse. Il se peut qu’il ne se rende pas aussi loin que la fois précédente, ce n’est pas grave, à la longue il y arrivera. Cette deuxième technique est efficace mais elle exige de l’espace ce que nous n’avons pas toujours devant la douche dans une écurie par exemple.

Ce qui est recherché chez le cheval c’est un changement de perception dans son évaluation de la situation ce que les horsemen appellent ‘’ association au positif’’. Donc, ce que le cheval perçoit comme dangereux au départ deviendra une zone de confort.

Schéma : Le cheval perçoit une zone comme étant inquiétante voire dangereuse. En utilisant diverses stratégies d’approche/retrait cette zone pourra être perçue comme zone de confort.

Quand le cheval est en laisse, on peut l’inviter à reculer mais il faut faire TRÈS attention car ça lui enseigne de reculer quand il a peur. On ne voudrait pas voir ça en randonnée ou en parcours de cowboy extrême, de ranch trail ou d’équitation de travail. Il est toujours préférable de l’envoyer travailler dans sa zone de confort puis de le réinviter vers l’endroit où il est inquiet. C’est donc perçu par le cheval comme quoi il doit travailler s’il ne prend pas la bonne décision.

Il est extrêmement important de ne jamais forcer un cheval à avancer mais de l’inviter et surtout de récompenser le moindre effort par une cessation de la demande. Un effort n’est pas toujours d’avancer les pieds mais ça peut être n’importe laquelle des étapes des phases d’exploration telles que citées précédemment dans l’article sur la relaxation. (6ième : Développer la relaxation)

Cercles (2 patrons qui se font en selle ou à pied avec une petite longe)

Travail à pied

Le développement d’un cheval commence par le travail à pied. Ainsi on adopte la même technique à pied que celle décrite ci-bas en selle sauf qu’à pied on peut y ajouter le concept de sentinelle puisque le leader est à côté et non assis sur son cheval. Le leader agit comme sentinelle (Le concept de la sentinelle). Il se place entre ce qui est perçu comme dangereux et son cheval puis quand le cheval sera confiant ça sera à son tour d’être la sentinelle.

Certes que lorsqu’on a pu développer la confiance du cheval à pied, le travail en selle est facilité. Toutefois, il y a foule de circonstances que c’est lorsque nous sommes en selle que le cheval voit un objet ou un endroit inquiétant.

La technique décrite ci-bas diffère selon l’endroit où se situe ce qui inquiète son cheval mais les principes sont toujours les mêmes :

  1. œil gauche avant œil droit
  2. commencer par un grand cercle
  3. diminuer la grandeur des cercles lorsque le cheval est détendu
  4. agrandir les cercles quand cheval est inquiet
  5. demander le trot ou le galop seulement lorsque le cheval est détendu
  6. diminuer l’allure quand le cheval est inquiet

Cercle à gauche afin d’exposer l’œil gauche; on exécute ce cercle jusqu’à ce que le cheval soit détendu.

 

L’objet ou l’endroit est au centre des cercles

Note de Lyne : Il est préférable de le faire à pied au début, en vous plaçant entre le cheval et l’objet qui crée de l’inquiétude. De cette façon, le cheval se sentira plus en confiance. Il apprivoisera ce qui l’inquiète plus facilement.

Ensuite vous vous mettrez de l’autre côté du cheval, celui-ci sera alors la sentinelle. Débutez par un grand cercle et rapetissez votre cercle lorsque vous sentez votre cheval plus détendu.

Vous sauverez énormément de temps de le faire à pied en premier et ensuite à cheval.

Plus votre cheval deviendra confiant en lui et en vous, plus vous pourrez aborder les situations inquiétantes directement à cheval 🐎🤠❤️

Le même patron peut être utilisé que l’on soit à pied ou en selle lorsqu’on aide notre cheval à apprivoiser un objet/endroit inquiétant. Cette fois, l’objet/endroit se trouve au centre du cercle. On commence donc par un grand cercle à gauche car cet œil est moins inquiet.

On n’oublie pas le concept de sentinelle quand on est au sol. On rapetisse le cercle quand le cheval est plus rassuré. Une fois que le cheval a maîtrisé le tout au pas, on peut augmenter l’allure tout en se rappelant de diminuer l’allure et agrandir le cercle dès qu’il y a inquiétude chez notre cheval: toujours le concept YO-YO.

Puis on change de direction pour faire en main droite tel que démontré sur le schéma ci-bas.

Cercle à droite afin d’exposer l’œil droit; on exécute une fois que l’œil gauche est bien réussi et que le cheval est détendu.

Jack à l’aise avec l’œil gauche a pu négocier les cercles à main droite en exposant son œil droit et en adoptant le rôle de sentinelle car il est en assez bonne confiance. Il n’est pas encore rendu au mini-cercle tout proche de la toile.

 

L’objet ou l’endroit qui inquiète le cheval est à l’extérieur du cercle.

Note de Lyne : Il est préférable de le faire à pied au début, en vous plaçant entre le cheval et l’objet qui crée de l’inquiétude. De cette façon, le cheval se sentira plus en confiance. Il apprivoisera ce qui l’inquiète plus facilement.

Vous utiliserez la même technique que j’ai expliqué plus haut dans “Mot de Lyne” lors du travail autour de l’objet ou endroit inquiétant

Le cavalier demande au cheval d’exécuter un grand cercle dont un des points du cercle est proche de l’objet ou de l’endroit inquiétant. Un exemple : dans le manège quand il y a beaucoup de bruit et d’activité dehors ou quand le cheval a peur du coin au fond du manège. À ces moments, il faut penser à faire nos cercles en considérant l’endroit inquiétant à l’extérieur des cercles.

On commence par des cercles à droite afin que l’œil gauche, plus courageux, soit l’œil qui approchera le ‘’monstre’’ au lieu de l’œil droit. On n’oublie pas le concept de sentinelle quand on est à pied.

Lorsque le cheval sera détendu, on pourra rapetisser le cercle graduellement tant que le cheval demeure détendu. Dès qu’il a un peu de tension chez notre cheval on agrandit le cercle.

La grandeur du cercle de même que l’allure sont déterminées par le niveau de stress du cheval.

N’hésitez jamais à agrandir le cercle ou diminuer l’allure dès qu’il y a stress donc de toujours appliquer la stratégie approche/retrait.

N’oublions pas que c’est comme un yo-yo, parfois on agrandira les cercles puis on diminuera tout comme on diminuera ou augmentera l’allure selon le niveau de stress; ce n’est pas un processus linéaire : concept fort important.

Il est aussi très important que le cheval soit calme quand on augmente l’allure car il ne faut pas oublier qu’un cheval craintif peut avoir tendance à aller vite pour passer le coin inquiétant au plus vite.

Il est aussi important de faire les cercles dans les deux directions car l’interprétation de chaque œil n’est pas la même, l’œil droit est habituellement un œil plus inquiet. Une fois les cercles à droite bien maîtrisés on recommence avec des cercles à gauche afin de travailler avec l’œil droit tel que démontré ci-bas:

 

Schéma : on commence par des cercles à droite car ça sera l’œil gauche qui approchera le monstre, autant à pied qu’en selle dû au fait que l’élément qui inquiète le cheval est à l’extérieur du cercle.

Manon exécute ses cercles à droite avec l’œil gauche vers le ballon. Elle agit comme sentinelle : elle a agrandi ou rapetissé les cercles selon le niveau de confiance de Jack. Le ballon est à l’extérieur des cercles.

Cercle à gauche, ça sera l’œil DROIT qui verra le monstre quand il s’en approchera, autant à pied qu’en selle. On exécute ce cercle une fois que le cheval est à l’aise avec les cercles où l’œil gauche a accepté et que le cheval est détendu.

 

Indy effectue un cercle à gauche (œil droit), rênes lâches, devant l’unicorne qui projetait de l’eau lors d’une clinique de Lindsey Partridge de Harmony Horsemanship en Ontario. Photo : Hélène Tremblay

Une fois le cheval à l’aise proche de l’objet/endroit, on pourra l’amener face à cet objet/endroit, puis les deux côtés proches de l’objet/endroit et finalement lui demander d’aller à l’obstacle et de mettre le cheval dos à celui-ci.

Il ne faut pas oublier dans les deux exemples ci-haut cités qu’un cheval inquiet peut avoir tendance à augmenter l’allure. Encore là, toujours le même principe, on augmente l’allure seulement lorsque votre cheval est détendu.

CHALLENGE DU MOIS

Trouvez des objets ou endroits inquiétants pour votre cheval et aidez-le à se détendre et à apprivoiser le tout en utilisant la méthode des cercles.

Attention, je ne dis pas ‘’ longer’’ le cheval mais effectuer des cercles de grandeur variée à côté de lui en tenant compte de l’état émotif du cheval.

N’oubliez pas les notions émises le mois dernier dans le texte sur le refus ou l’hésitation. (10ième article : votre cheval hésite ou refuse face à un obstacle-défi quelconque….comment intervenir!)

Denyse Rousselet

Denyse Rousselet

Denyse Rousselet, cavalière du Québec depuis 35 ans, a eu l’immense privilège depuis une douzaine d’années de voyager à la rencontre de nombreux horsemen/horsewomen fort reconnus pour leurs compétences en horsemanship tout en étant aussi réputés pour leurs performances exceptionnelles avec leurs chevaux. Plusieurs stages en France, Italie, Costa Rica, USA, Ontario et Colombie Britannique totalisant environ un an, lui ont inculqué des notions, concepts et stratégies pas fréquemment enseignés dans nos milieux équestres. Ce cheminement a amené Denyse à être reconnue par ses conférences et cliniques sur le développement d’un bon cheval de randonnée ainsi que des diverses stratégies afin de développer un cheval confiant, sécuritaire et bon partenaire.

Je m’appelle Lyne Laforme

Entraîneure et coach professionnelle en éducation

Lyne Laforme - Coach éducation cheval

 Depuis 1980, j’aide les cavalières et cavaliers à entraîner leurs chevaux pour établir une relation harmonieuse avec leur cheval et à devenir le centre de son univers.

Je suis aussi l’auteure du “Manuel d’équitation Western – Un plaisir partagé” vendu à plus de 10 000 exemplaires et disponible sur Amazon.

En 2013, j’ai reçu la médaille du Jubilé de la Reine Élisabeth II pour ma contribution significative apportée au développement des programmes d’enseignement et d’entraînement en sport équestre au Canada et en Europe.

Aujourd’hui, je veux transmettre les connaissances que j’ai acquises avec l’expérience et les centaines de cavalières et cavaliers que j’ai pu rencontrer.